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    LE SACRIFICE. Patrice, 3 octobre 2000.

     

       Le soleil, à son zénith, baigne le temple ;

    Ses rayons chaleureux et irisés

    Se reflètent sur les toges blanches et amples

    Des prêtres-rois divinisés.

     

       Le vacarme de la foule en transe

    Fait place aux hymnes, aux louanges.

    Les nymphes dénudées entrent en danse

    Sous les regards médusés des faux anges…

     

       Musique lancinante, rythme obsédant,

    Berçant de douceur la force des chants.

    Agenouillés devant le grand autel,

    Les condamnés, l’œil rivé vers le ciel…

     

       Déjà, on entend le crépitement

    De l’enfer des brasiers déments ;

    Le feu lèche de ses flammes

    Les corps sacrifiés pour ce drame !

     

       Résonnent les lamentations,

    Y répondent les acclamations

    Des témoins en prières

    Sous l’écarlate lumière…

     

       Montent vers l’empyrée

    Les cris d’animaux immolés,

    L’agonie des égorgés, des crucifiés,

    Noyés dans le sang des écartelés,

    Mêlés d’hallucinantes vaticinations,

    De délirantes incantations…

     

       Ce charnier offert aux dieux,

    Les saigneurs prient les odieux.

    Les pèlerins reprennent leur route,

    Le crépuscule caresse leurs doutes…

     

       Au loin, une auréole vermeille,

    Efface cette journée cruelle.

    L’effusion de mort pour la terreur !

    Les despotes, encore, sortent vainqueurs !

     

       On assume la honte d’un sacrifice

    À la peur de l’ombre d’un maléfice.

    Les paroles divines et sacrées sont lues,

    Alors le peuple obéît aux héros élus !

     


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    LE POÈTE SACRIFIÉ. Patrice, novembre 1999.

     

     

       C’était un fier guitariste

    À l’œil clair, au regard triste ;

    Certains le considéraient comme un poète, un prophète,

    D’autres l’exécraient telle une peste, une maudite bête…

     

       En quelques vers, il rendait espoir

    À ceux qui avaient tout perdu ;

    Il ne cessait de croire

    Que l’humain avait des vertus…

     

       Patrouillant dans des rues

    Déchirées par les obus,

    Les troupes de soldats armés

    Aux âmes damnées…

     

       La liberté au bûcher, autodafé ;

    La paix, l’espoir sont sacrifiés…

    Malgré la haine, lui, rêve

    À une prochaine trêve.

     

       Il écrit l’amour,

    Il chante pour toujours !

    Il joue pour contrer l’horreur ;

    Il rythme la vie des rêveurs !

     

       L’inévitable guette,

    Les bras armés de la tyrannie

    En cellule, le jettent

    Pour taire ce cri !

      

       Mais l’ombre terrible du cachot

    Ne l’empêchera pas de coucher ses mots

    Sur les planches brisées

    De son instrument préféré…

     

       Cruauté du destin,

    Ses ignobles geôliers

    Lui ont tranché les mains

    Et sa langue de parolier…

     

       Il ne pourra désormais

    Plus crier l’amour, la liberté !

    Il ne pourra plus serrer

    Les poings de fraternité…


    à Victor Jara (1932-1973) entre autres...


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    LE PANIER DE CAFARDS. Patrice, juin 2000.

     

       Ce panier de cafards se vautrant dans leur fange et leur médiocrité,

    Profitant de nos cécités, de nos égoïsmes, de nos frilosités

    Et de nos résignations pour s’inscrire dans le cours de l’histoire,

    Pour se sentir ainsi appartenir à une élite intellectuelle

    Que je renie, que je dénigre, que j’exècre, que j’abhorre…

    Sur leurs tas d’immondices fétides et purulentes,

    Je me dresse sans honte !

     

       La lumière et les caméras les excitent et les grisent,

    Ainsi, dans un coït géant,

    Il partage leurs joies-semences

    Et pullulent sous les flashes médiatiques.

    Ces cloportes héliotropes nous chantent leurs refrains sacrés,

    Bercés d’illusions, nous sombrons dans l’apathie

    Pour une danse macabre en gloire de leur victoire,

    Que nous célébrons, hagards et ivres,

    Comme si elle était nôtre !

     

       Témoins muets de notre éternelle misère,

    Nous subissons en geignant

    Le poids du fardeau trop lourd de l’acculturation.

    Les yeux embrumés d’une impression de joie,

    Certains s’empressent de leur baiser les pieds,

    Qui nous foulent, hautains, évitant la souillure

    Que nos membres amaigris pourraient leur causer.

    Un aria somptueux monte des nefs

    Du temple érigé pour les idoles.

     

       Le chapiteau est décoré pour la foire,

    Les projecteurs sont braqués sur les clowns,

    Sourires et larmes sont les seules armes autorisées,

    Vous devez laisser votre âme à l’entrée

    Et ne pas susurrer vos douleurs et angoisses,

    Mais communier votre candeur…

    Des propos vides de sens devenus axiomes philosophiques,

    Alors que la vérité, elle, paraît invraisemblable

    Aux oreilles des sourds entendant…

     

       Cette société du spectacle me fait vomir,

    M’enrage et me glace d’effroi…

     


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          LE MESSIE. Patrice, novembre 1998.

     

       Je commence mon chant,

    Après tant d’égarements ;

    Je souris, mais je mens,

    Car j’ai envie de pleurer…

    Mon âme, mon cœur, torturés,

    Dissimulent de mal en pis

    Cette rancœur qui m’emplit,

    Ce chagrin qui m’irradie…

     

       Paralysé d’intérieures douleurs,

    Ma peur en devient terreur ;

    Mes silences

    Cachent ma démence !

    Mon corps fiévreux

    Hantés des chœurs malheureux…

     

       Refrain :

     

       Je ne suis pas le héros que l’on croit !

    J’ai juste été cloué sur cette croix !

    Toute cette histoire sur ma vie,

    Pour faire croire à l’enfer, au paradis ! 

     

       À chaque misère, à chaque guerre,

    S’accroît et s’enrage ma colère !

    À chaque cri, à chaque rage amère,

    Je suis de nouveau sacrifié,

    Je suis l’éternel condamné,

    Je dois sans cesse souffrir ;

    Puis, enfin, finir par en mourir.

    Devoir assumer les horreurs humaines,

    Emplies de fiel, emplies de haines…

     

       Je me dois de sauver l’esprit,

    L’esprit l’âme et la chair ;

    Je me morfonds en prières.

       À chaque larme, à chaque cri,

    Je vois brûler l’univers,

    Bientôt, j’y verrai l’enfer !


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    Le mélèze. Patrice K 20 janvier 2002.

     

    Si la solitude te pèse,

    Adosse-toi à ce mélèze.

    Ecoute le vent dans son ramage,

    Conte-lui tes peines et tes rages.

     

    Je suis cet arbre courbé et fier,

    Dressé au milieu des déserts.

    Viens loger sous mon écorce,

    Je te donnerai de ma force…

     

    Douleurs, angoisses et colères

    Te seront dissipées.

    J’atténuerai les tonnerres

    Pour qu’ils te soient apaisés.

     

    Plus rien ne pourra t’atteindre.

    De ma cime, de mon faîte,

    Je veillerai sur tes songes,

    Je te garderai des mensonges.

     

    Refrain :

     

    Du haut de ma colline, je domine l’océan ;

    Les vents portent en eux les embruns du monde.

    Viens goûter avec moi ces parfums envoûtants,

    Te griser et chanter et danser sous mon ombre…


     

    à Sabrina M.


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